Extérieur/froid : une typologie du sapin de Noël après usage

A notre époque où une pléthore de gadgets envahit chaque recoin de l’existence occidentale, même les symboles battent de l’aile et s’abîment dans le consumérisme le plus banale. Noël, dont l’esprit agonise à qui mieux mieux, n’échappe pas à la règle et accompagne son arrivée sur les étals de toute une panoplie bigarrée : bûches glacées, dindes farcies, huîtres, foie gras, cartes musicales, cadeaux enrubannés, décorations, gros bonhomme rouge. Une fois les agapes passées, les uns disparaissent au fond d’une canalisation ou terminent sur une étagère comme aimant à poussière, les autres sont remisés dans leur univers de naphtaline ou retournent pointer au chômage. Cependant tout cela se déroule dans l’opacité moite des foyers – si ce n'était un réfractaire : le sapin de Noël. Ce dernier rejoint la cohorte des jetables : la lentille de contact pour la vue jetable, le préservatif pour l’amour jetable, l’intérimaire pour le travailleur jetable et... le sapin de Noël pour la tradition jetable.

Le voilà donc gisant sur le trottoir parmi les chewing-gum, les déjections canines, les mégots de cigarettes et les sans-abris. Lui qui il y a peu encore émerveillait le regard des enfants et suscitait chez eux l’attente de présents ardemment convoités encombre la voie qu’emprunte l’honnête passant et l’oblige à quelque zigzag impromptu sans même recevoir un regard de gratitude pour la tâche accomplie. Est-ce là le fait d’une secrète culpabilité - comme tendrait à le prouver l’abandon nocturne auquel se livrent une majorité d'ex-propriétaires – ou d’un dédain s’affichant dans toute sa superbe ? A noter également la promptitude avec laquelle les services de nettoyage municipaux effacent les traces de l'objet délic(t)ieux.

Grâce à cette typologie, rendons hommage à cet anonyme et éphémère ornement de nos Noël passés, présents et futurs.



Série réalisée en janvier 2009